Une ONG lyonnaise dans le collimateur de la mission anti-sectes

Une ONG lyonnaise dans le collimateur de la mission anti-sectes

Oasis d’amour, une association humanitaire qui vient en aide à plus de 700 familles chaque semaine dans l’agglomération lyonnaise, est sous le joug de plusieurs enquêtes. Dont une diligentée par la Miviludes, la mission interministérielle de lutte contre les dérives sectaires.

Le président de la Miviludes, Serge Blisko, juge le dossier "particulièrement sensible". Dans un courrier daté du 22 janvier dernier, que nous avons obtenu, il indique avoir ouvert une enquête sur l’association Oasis d’amour.


Eglise évangélique

C’est la proximité de la présidente de l’association avec le mouvement évangéliste qui alimente les soupçons. Interrogée par Lyon Mag, Anne-Marie Vincent-Girod nie et affirme être une "simple chrétienne". Mais elle est vue dans une vidéo de l’Eglise évangélique l’Abri-Vcf dans laquelle la présidente d’Oasis d’amour affirme que le projet de l’association est "de recruter des âmes à Christ", mission évangéliste par excellence.


"Je connais cette vidéo", se défend Mme Vincent-Girod "mais il ne faut pas la sortir de son contexte qui est celui d’une réunion le dimanche matin dans une Eglise. Je suis chrétienne, pas plus. Je prie simplement pour les bénévoles de l’association dans la liberté religieuse de chacun".


La structure qui fournit de l’aide alimentaire et propose diverses œuvres sociales (hébergement social, aide au désendettement) a pourtant pignon sur rue dans l’agglomération lyonnaise.


Reconnue association d’intérêt général et de bienfaisance en 2006, la structure a également su convaincre des collectivités territoriales comme la région Rhône-Alpes de lui accorder 30 000 euros de subvention et bénéficie du soutien de grands groupes régionaux ou nationaux ainsi que de grandes banques.


Oasis d’amour est par ailleurs titulaire de l’habilitation préfectorale qui permet de recevoir et de distribuer de l’aide alimentaire publique assujettie à une défiscalisation de 60% de l’impôt sur les sociétés pour les distributeurs tels que les grandes chaînes de supermarché qui font des dons en nature aux associations d’aide alimentaire.


A ce titre, Oasis d’amour est également soupçonné d’un détournement des produits de cette défiscalisation qui est une contribution publique destinée à la mise en œuvre de l’aide alimentaire. "La défiscalisation, qui est une aide publique, est-elle autorisée pour faire du prosélytisme actif ?", s’interroge une source proche du dossier.


L’affaire du Madoff ivoirien

Avisé de ces soupçons, le préfet de Région a décidé d’en informer le procureur de la République de Lyon. Car outre la question du but – hypothétiquement – évangélique de l’association, des inquiétudes se font jour sur sa transparence financière.


La présidente de l’ONG, Anne-Marie Vincent-Girod, a en effet œuvré au sein du scandale du "Madoff ivoirien". Elle a incité des proches de bénévoles au sein d’Oasis d’amour d’investir au sein de Gedeon Financial Corporation, un fonds de pension américain dont le dirigeant, le pasteur d’origine ivoirienne Marc Dehi, a été mis en examen pour escroquerie en bande organisée et exercice illégal de la profession de banquier en 2007 en Martinique avant qu’il ne fuit au Ghana où il fut emprisonné.


"Dans cette affaire, je suis une victime. C’est une pure escroquerie. Je devais en effet recevoir une commission pour chaque personne que je faisais adhérer à cette société. Mais je n’ai jamais rien reçu. Le dirigeant a été poursuivi dans une vaste affaire d’escroquerie mais je suis étrangère à ça", se défend Anne-Marie Vincent-Girod.


Avec près de 700 familles aidées sur la région lyonnaise chaque semaine par une centaine de bénévoles, les soupçons qui pèsent sur Oasis d’amour sont donc jugés sérieux par les autorités publiques. D’autant plus que Les Restos du cœur, le Secours Populaire Français et la Banque Alimentaire du Rhône se sont ouvertement inquiétés auprès de ces mêmes autorités des agissements de cette ONG lyonnaise.


Slim Mazni