Dabadie, Noé et Tarantino, Le Bon, la Brute et le Truand

Dabadie, Noé et Tarantino, Le Bon, la Brute et le Truand

En attendant Park Chan Wook ce jeudi après-midi à la Comédie Odéon, le Festival Lumière a offert aux spectateurs un trio de haut niveau en présentant successivement les masters class de Jean-Loup Dabadie, Gaspar Noé et Quentin Tarantino.

Dabadie est bon, c’est indiscutable, à l’oral comme à l’écrit. Il donne de surcroit le sentiment d’être une bonne personne, un solide partenaire d’existence comme a pu en témoigner Guy Bedos, qui l’a accompagné durant ces différentes interventions.

Devant un public conquis d’avance, qui connaissait par cœur les refrains des chansons qu’il a écrites, entre autres pour Julien Clerc, ou les répliques les plus célèbres de ses films, l’écrivain de spectacles comme il se définit, aura régalé l’assistance de savoureuses anecdotes. 

 

Dabadie est sans doute le dernier gentilhomme du cinéma français. Il est habité par une joie contagieuse, une gourmandise de la vie, de la création et des rencontres qu’il communique avec un art consommé de conteur parfois un peu cabotin, mémorialiste de cinéastes populaires comme Claude Sautet ou Yves Robert, d’acteurs talentueux tels que Montand ou Romy Schneider. La liste de ses succès dans le théâtre, la chanson ou le cinéma serait trop longue à citer. Un mot résume cette riche carrière : le talent.

 

Gaspar Noé a également fait salle pleine avec un public particulièrement jeune. On s’attendait à des provocations ou des déclarations sulfureuses tant le cinéaste de Love ou d’Irréversible traine cet image de Bad boy du cinéma français. C’était mal le connaître ! Noé a donné un master class très construit, expliquant de manière posée le mode de création de ses films, son rapport au cinéma ou aux acteurs. Il ne faut donc pas confondre un metteur en scène avec ses films. Noé n’est pas la brute que les médias décrivent même si ces films sont brutaux dans leur description sans fard et souvent dérangeante des rapports humains.

Thierry Frémaux qui présentait ce master class a pu ainsi définir le credo de Noé dans son rapport à la violence, démontrant que son cinéma cherchait à la représenter telle qu’elle était dans sa laideur voire son caractère insoutenable plutôt que de la styliser et de l’exploiter comme dans la majorité des autres films.

 

C’est devant un auditorium plein comme un stade que Quentin Tarantino s’est livré à un exercice cinéphilique de haut niveau durant près de deux heures alors que son intervention ne devait pas dépasser une heure. Il fallait connaître le cinéma des années 70 et ce que l’on nomme la période dite du Nouvel Hollywood pour suivre l’intervention du plus lyonnais des cinéastes américains. Intarissable, passionné, convaincant, Tarantino s’est manifestement déjà glissé dans la peau du professeur de cinéma qu’il a annoncé devenir lorsqu’il aura renoncé à tourner des films.

 

Tarantino n’est naturellement pas un truand au sens littéral du terme ! Il reste néanmoins un beau braqueur pour avoir réussi, au début de sa trentaine et sans avoir fait la moindre école de cinéma, un hold up de cinéma avec le succès mondial de son premier film Réservoir Dogs puis le hold up de la Palme d’or pour son second film Pulp Fiction ! Cinéaste surdoué et populaire, Tarantino a forgé son imaginaire en synthétisant le meilleur des films de genres, se contentant de l’école des salles de cinéma et des vidéos à domicile. Il veut transmettre aujourd’hui par l’enseignement, tout ce que le cinéma qu’il soit commercial ou d’auteur lui a donné. Le prochain Tarantino est peut-être un jeune spectateur du Festival Lumière !

 

Eric Pelet