Vénissieux : une vente de véhicules par la mairie fait polémique

Vénissieux : une vente de véhicules par la mairie fait polémique

Michèle Picard, maire de Vénissieux, est-elle moins habile que Laurent Wauquiez pour la vente de voitures d’occasion ?

C’est du moins ce que croit son opposant préféré Lotfi Ben Khelifa (PS). Le 5 décembre dernier il écrivait au préfet pour demander l’annulation de la vente de six véhicules légers, six scooters et deux camionnettes par la mairie de Vénissieux, pour la somme globale et néanmoins modeste de 2500 euros, à une société privée : Sovelis. Une entreprise vénissiane qui a pignon sur roue. Le tout sans appel d’offre, ce qui n’est pas obligatoire pour les marchés de moins de 25 000 euros. Mais aussi sans passer par les domaines pour une évaluation des véhicules, ce qui aurait pu rendre service.

 

La liste détaillée est édifiante. On y trouve un Renault Master de 1996 abandonné pour 150 euros. Le même en version frigo (2000), pour 600 euros. Quatre Peugeot 106 diesel (2000) dont les prix varient inexplicablement de 150 à 300 euros. Une Clio (2005) à 200 euros et un Renault Scénic (2003) pour 200 euros. C’est mieux qu’à la Foire-Fouille.

 

En fouillant un peu justement, on trouve des prix assez différents pour des véhicules comparables, sur des sites de vente de voitures d’occasion. La même Peugeot 106 sort à 1 177 euros, la Renault Clio à 2 805 euros, le Scénic à 2 790. Mais les nôtres sont des "épaves", se défend la mairie de Vénissieux, elles sont destinées à la casse. On se demande comment quatorze véhicules ont pu tomber en panne en même temps. Quel cataclysme a frappé le parking de la Ville dans la nuit, de la veille au lendemain ? Mais non ! On n’a rien compris.

 

Ce n’est pas ça du tout. D’après la société Sovelis, la réalité est beaucoup plus prosaïque : les collectivités mettent de côté les véhicules au rebut, et les vendent d’un coup par lot, quand il y en a suffisamment. Vénissieux aurait donc tout simplement stocké les épaves au fur et à mesure qu’elles clamsaient. On ne félicite pas les utilisateurs de la Ville qui ont réduit à l’état de ruine des véhicules dont certains ont à peine plus de dix ans.

En tout cas, le fait d’avoir été abandonnées dans un parking pendant des mois n’a pas dû arranger leur état. Les quatorze carcasses auraient donc légitimement été vendues au prix de la casse, un prix d’autant plus incontestable que c’est l’acheteur lui-même qui l’a fixé, comme c’est lui qui a évalué l’état du véhicule.

 

Mais que deviennent ces cadavres à roulettes une fois remis aux bons soins du vendeur ? Personne ne semble capable de donner une réponse fiable. Vendues en pièces détachées ? Oui, bien sûr, semble suggérer l’entreprise comme la mairie. Vendues en l’état à des clients privés pour qu’ils roulent avec, quitte à faire des réparations ? Pas impossible non plus.

 

Tentons de débrouiller l’écheveau. Le directeur technique de la Ville utilise indifféremment le terme "véhicules non-roulants" et le terme "épave". Or ce n’est pas pareil. Un "non-roulant", c’est un véhicule qui a été retiré de la circulation. Il a fait l’objet d’une déclaration en préfecture avec restitution de son certificat d’immatriculation. Il n’a plus le droit de se trouver sur les routes. Il n’est plus assurable. De plus, et c’est là que ça devient rigolo, le site Service-Public.fr est formel "Non. Vous ne pouvez pas vendre un véhicule non-roulant, même en pièces détachées, et ceci depuis la mise en place du système d’immatriculation des véhicules (SIV) en 2009".

 

Qu’est-ce qu’une épave ? D’après l’article L325- 1 du Code de la route, ce sont : "les véhicules qui (...) sont privés d’éléments indispensables à leur utilisation normale et insusceptibles de réparation immédiate" que ce soit à la suite d’un accident ou d’une avarie. Eux peuvent être vendus en pièces détachées. Mais il faut que la carte grise soit neutralisée, barrée avec la mention "ANNULÉE". La préfecture doit alors recevoir la photocopie de cette carte annulée ainsi que le certificat de vente.

Le préfet est saisi d’une demande d’annulation de la délibération municipale. Soit il retrouve les quatorze déclarations de véhicules non-roulants, et aucune vente ne peut avoir lieu, on se demande bien pourquoi Sovelis a acheté ces véhicules. Soit il retrouve les cartes grises annulées et en même temps la trace des transactions de vente. Soit il ne retrouve rien du tout et les véhicules sont en état d’être vendus à des utilisateurs.

 

Au garage Picard, le téléphone sonne dans le vide. Malgré plusieurs appels, la maire communiste n’a pas jugé bon de répondre à nos aimables sollicitations.