Norbert Dentressangle lorgne sur le Musée des tissus

Norbert Dentressangle lorgne sur le Musée des tissus

L’ex-transporteur lyonnais vient de racheter l’ancien siège de la Maison de l’environnement.

"La société Dentressangle s’est montrée intéressée par l’acquisition de ce bien." Qu’en termes élégants ces choses-là sont dites. Telle est effectivement la réponse que nous a fait la Métropole de Lyon quand nous l’avons interrogée sur la vente de l’immeuble qui fait l’angle des rues de la Charité et Sainte-Hélène. Celui-ci abritait jusqu’à ces derniers mois les bureaux de la Maison rhodanienne de l’environnement. Laquelle a brusquement été priée de quitter les lieux. On reconnaîtra qu’elle n’a pas perdu au change ; la Métropole l’a relogée dans des locaux nettement plus fonctionnels et plus modernes avenue Tony Garnier, dans le 7e arrondissement. Quant au prix, on nous a simplement indiqué qu’il "est conforme à l’estimation de France Domaine".

 

Cette discrétion est pour le moins étonnante. D’autant qu’il suffit d’aller sur le site de la Métropole pour avoir accès à la décision 2017-1547 prise en commission permanente le 3 avril dernier. On y apprend que le bien a été vendu 1 650 000 euros. On y apprend aussi qu’il s’agit d’un immeuble de bureaux, composé : - d’un bâtiment sur rue avec entrée rue de la Charité comprenant des caves, un rez-de-chaussée, un étage et des combles aménagés, - d’un bâtiment attenant sur cour comprenant un rez-de chaussée et un étage dont l’entrée située rue Sainte-Hélène est en retrait par rapport à l’alignement de la rue et permet l’aménagement d’un espace-jardin situé sur la parcelle. Sa surface utile est de 835,20 mètres carrés. Quand on sait que Dentressangle est propriétaire de l’Hôtel particulier mitoyen rue Sainte-Hélène, on comprend qu’il n’ait pas laissé passer l’occasion.

 

D’autant que le prix ne paraît pas trop élevé. Car 1,65 million d’euros pour 835 m2, ça nous fait le mètre carré à tout juste 2 000 euros. Pour un bien situé au coeur du très cher quartier d’Ainay, c’est le genre d’affaire à ne surtout pas laisser à d’autres.

 

On ne doute pas que des travaux soient nécessaires. Mais à ce que l’on sache, l’immeuble était loin d’être en ruine. On n’a pas entendu dire que ceux qui l’occupaient aient été en danger. En outre, il est situé en retrait par rapport à l’alignement de la rue Sainte-Hélène ce qui permet l’aménagement d’un espace jardin.

 

Voilà qui ne peut que donner un peu plus de valeur à l’immeuble. Du coup, à 2 000 euros, c’est incontestablement une très bonne affaire. Un peu comme celle qu’a réalisée ce fond de pension américain à qui Gérard Collomb avait bradé les immeubles du quartier Grolée. Il suffit d’aller sur n’importe quel site pour découvrir que le prix moyen du m2 dans ce quartier est évalué à plus de 4 400 euros. Et encore, les tarifs peuvent littéralement s’envoler. Dentressangle est bien placé pour le savoir. Sa filiale OGIC commercialise à 8 000 euros le m2 certains des appartements qu’elle a rénovés place Bellecour (dans les anciens locaux de la faculté catholique).

 

Si l’on en croit certaines confidences, Norbert Dentressangle pourrait être intéressé par d’autres immeubles prestigieux dans le quartier. On murmure qu’il regarde d’un oeil gourmand le 34 rue de la Charité. Les Lyonnais connaissent bien les deux bâtiments qui abritent le Musée des tissus (Hôtel de Lacroix-Laval) et le Musée des Tissus et des arts décoratifs (Hôtel de Villeroy). On connaît les difficultés financières que rencontre actuellement ce trésor lyonnais. L’un des problèmes concerne l’Hôtel de Lacroix-Laval qui n’est plus aux normes et ne pourra bientôt plus accueillir de public. 15 à 20 millions d’euros sont nécessaires pour le rénover. Personne ne semble prêt à dépenser une telle somme, d’autant qu’il faudra également trouver les moyens de faire vivre le musée. L’une des solutions pourrait passer par la vente de ces deux hôtels qui sont la propriété de la Chambre de commerce et d’industrie de Lyon.

 

À Lyon, il se dit depuis longtemps que la vente est impossible, la donation du lieu et des collections ayant été faite à la condition expresse que le bâtiment soit utilisé pour présenter les collections au public. Lors d’une récente réunion, le président de la CCI, Emmanuel Imberton a semblé balayer ces restrictions, affirmant que tout est réglé au niveau des actes de propriété. Interrogé par nos soins, il n’a toutefois pas daigné nous répondre.